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Harcèlement Sexuel au travail

Selon le sondage ifoP « les françaises et le harcèlement sexuel au travail » pour VieHealthy réalisé en 2018, une française sur trois a été confrontée à une situation de harcèlement sexuel au cours de sa vie professionnelle, sans pour autant en avoir conscience. En effet, si 32% des femmes interrogées cochent toutes les cases qui permettent de dire qu’elles ont vécu une situation de harcèlement au sens juridique du terme, seulement 20% ont ce sentiment. Et finalement seulement 5% des cas seraient portés devant la justice…

Comme nous avons pu le voir, le harcèlement moral ou psychologique est extrêmement violent voire destructeur pour les êtres humains mais le harcèlement sexuel, lui, touche l’intimité. La déstabilisation est donc beaucoup plus intense. Chaque individu réagit de façon différente à des agressions mais nous essayerons ici de décoder et déconstruire ce mécanisme dans le monde professionnel, toujours dans une démarche de prévention (et pourquoi pas, de guérison…).

Marie Deveaud-Plédran dans sa thèse au sujet du harcèlement dans les relations de travail explique très bien, à mon sens, toute la spécificité du harcèlement sexuel et la dimension que peut prendre de tels agissements au travail.

Mais concrètement, à quoi ressemble le harcèlement sexuel au travail ?

Heinz Leymann, docteur en psychologie ayant étudié harcèlement moral, a noté trois comportements relevant du harcèlement sexuel dans la sphère professionnelle :

  • l’utilisation de propos obscènes ou dégradants
  • une approche ou une proposition verbale de relations sexuelles
  • des agressions physiques, qu’il appelle «passages à l’acte»

Au travail, ces comportements peuvent créer « une situation hostile, intimidante ou offensante » et porter atteinte à la dignité d’une personne, en voici quelques exemples :

  • « Plaisanteries » obscènes, dégradantes
  • Dévisager avec insistance
  • Déshabiller du regard
  • Commentaires sur le physique, le comportement, la tenue vestimentaire
  • Questions privées et/ou intrusives
  • « Avances » à connotation sexuelle
  • Des invitations dans des lieux ou à des horaires compromettants
  • Des cadeaux gênants
  • Adopter une gestuelle à connotation sexuelle
  • Proximité physique intrusive, même sans contact
  • Attouchements, même considérés sans connotation sexuelle.

Tous ces comportements ne sont pas anodins et doivent être pris au sérieux. Il n’y a aucune raison qui puisse justifier un tel manque de professionnalisme surtout lorsque ces approches ne sont pas consenties.

Le harcèlement ce n’est pas de la drague

Le début de la libéralisation de la parole avec #MeToo permet de remettre la séduction dans le contexte qui est le sien. Un contexte qui se veut plaisant et partagé. A la différence du harcèlement sexuel, la drague est admise au travail tant que le ressenti est positif comme le souligne le livre blanc de la prévention du harcèlement sexuel au travail élaboré par l’ANDRH (Association Nationale des DRH).

Pour rappel, le harcèlement sexuel est sévèrement puni dès lors que les agressions répétées portent atteinte à la dignité d’une personne ou qu’elles créent une situation intimidante, hostile ou offensante (2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amande).

Bon à savoir :

  • Un fait unique peut suffire à caractériser le harcèlement sexuel
  • Depuis le 6 août 2012, la victime n’a plus à apporter la preuve du harcèlement sexuel.
  • Il y a harcèlement sexuel même s’il n’y a aucune relation hiérarchique entre la personne harcelée et son harceleur.
  • Les personnes qui harcèlent sont passibles de sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu’au licenciement.
  • Malgré les ordonnances Macron du 22 septembre 2017 qui fixe désormais un barème des indemnités prud’homales, en cas de harcèlement sexuel, ce barème ne s’applique pas.

Quand le harcèlement est environnemental…

Le 7 février 2017, la cour d’appel d’Orléans a reconnu l’existence d’un harcèlement sexuel d’ambiance ou environnemental. Le harcèlement d’ambiance est caractérisé par une situation où « sans être directement visée, la victime subit des provocations et blagues obscènes ou vulgaires qui lui deviennent insupportables ».

Les réactions face au harcèlement sexuel au travail

Alors comment réagissent les personnes face au harcèlement sexuel au travail dans la majorité des cas ? Et bien sachant que l’objectif est clairement de mettre la victime dans l’embarras, la première réaction va être la gêne. Forcément, au travail, personne ne s’attend à parler de sexualité. En tout cas, aucun contrat de travail ne stipule un consentement aux blagues perverses, aux remarques dérangeantes ou aux invitations déplacées alors quelles sont les solutions ? Marie Deveaud-Plédran développe, dans sa thèse, cette situation où la victime de harcèlement sexuel se retrouve face à deux choix :

« 1) Soit elle refuse catégoriquement les avances, se rebelle contre les plaisanteries grossières et, immanquablement, elle est traitée de « frustrée », de « frigide » de « mal baisée », etc. On se moque d’elle et les agressions reprennent de plus belle. Il arrive aussi que l’agressivité se déchaîne et qu’on lui assène que finalement, elle n’est ni désirable, ni belle, qu’elle est même « franchement moche », qu’elle n’a pas assez d’attributs ou qu’elle en a trop. Le mépris et les insultes seront le miroir du refus exprimé.
2) Soit, pour ne pas essuyer de nouvelles plaisanteries graveleuses ou des sarcasmes qu’elle ne parviendra pas à éviter, elle se prête au jeu, est contrainte de sourire ou se force à rire, ou encore proteste mollement, et là, elle est prise au piège. Elle sera pour longtemps encore la proie de son ou de ses agresseurs, surtout si le phénomène d’entraînement du groupe les renforce dans le sentiment de toute puissance et d’impunité et si la « #culture » de l’entreprise encourage de tels comportements. La situation peut même dégénérer et, si rien n’arrête le processus, déboucher sur de réels passages à l’acte. »
Marie Deveaud Plédran – Le harcèlement dans les  relations de travail
.

Elle ajoute également que « le harcèlement sexuel ne peut véritablement se définir qu’a posteriori, lorsque ledit comportement a été décodé et déconstruit ». C’était également l’intérêt de cet article. Tenter d’en savoir plus, de mettre des mots et de comprendre le mécanisme du harcèlement sexuel…


Pour en savoir plus, vous retrouverez ici quelques pistes de lecture ici.

Et par , vous découvrirez le témoignage de la blogueuse Fammelette, son expérience, sa réalité, son ressenti sur la question.


Vous avez connu le harcèlement sexuel au travail ?

Comment avez-vous réagit ?

Racontez-nous !

Moi aussi, je l’ai vécu.

J’en parle ici

1 réflexion au sujet de “Harcèlement Sexuel au travail”

  1. Merci pour ces explications claires et les illustrations bien construites (j’aime beaucoup la dernière notamment). Pour ma part, je n’ai effectivement posé les mots de « harcèlement sexuel » qu’à posteriori de situations que j’avais observées et ce une fois seulement sortie du dit environnement de travail « blagues en dessous de la braguette ». On est tellement habitué·e aux remarques sexistes dans la société de manière générale qu’une fois sur son lieu de travail on ne se rend pas forcément compte, on minimise, on fait abstraction… Et si cela nous arrive on va bien souvent se remettre, nous, en question. Mais on en parle de plus en plus et je pense que les nouvelles générations sont bien plus sensibilisées à ces questions alors j’ai bon espoir 🙂

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